Voyage sur la route du Kisokaidō au musée Cernuschi

Voyage sur la route du Kisokaidō au musée Cernuschi

Voyage sur la route du Kisokaidō – de Hiroshige à Kuniyoshi, Cernuschi

Il y a quelques semaines je vous présentais l’exposition Secrets de Beauté de la MCJP que j’ai eu l’occasion de découvrir en juin dernier. Comme j’en parlais rapidement dans le précédent article, ce n’est pas le seul événement auquel j’ai eu la chance d’assister pendant cette courte virée parisienne : le musée Cernuschi était aussi du programme avec son exposition Voyage sur la route du Kisokaidō – de Hiroshige à Kuniyoshi, que je devais initialement découvrir en octobre dernier.

2ème confinement oblige, ce moment culturel fut reporté, mais me voici enfin prête à vous en parler plusieurs mois plus tard. Attention, préparez le portefeuille : vous risquez de prendre vos billets pour Paris à la fin de cette lecture !

Voyage sur la route du Kisokaidō

Nul doute que vous connaissez le nom de la célèbre route du Tokaidō. Reliant Kyoto, l’ancienne capitale, à Tokyo, l’actuelle, le Tokaidō fut une grande source d’inspiration pour de nombreux artistes dont les plus célèbres Hokusai et Hiroshige. Mais ce que l’on connait moins, ce sont les autres routes qui composent le Gokaidō aux côtés du Tokaidō. « Les Cinq Routes d’Edo », le Gokaidō, forment les cinq routes majeures au départ d’Edo (l’ancien nom de Tokyo) qui permettaient de rejoindre des villes stratégiques, commerçantes et politiques comme Kyoto ou Nikko, les plus connus. Commerçants, artisans, daimyo, familles, pèlerins… tous empruntaient les routes du Gokaidō, et tout particulièrement celle du Tokaidō.

Longeant la côte, le Tokaidō traversait, entre autres, Hakone au sud du Mont Fuji, la préfecture de Shizuoka, la ville de Nagoya pour finir sa route dans la célèbre Kyoto. Mais une alternative au Tokaidō, jugée plus difficile, permettait également de relier Tokyo et Kyoto : le Kisokaidō. Au aurevoir les beaux paysages côtiers, le Kisokaidō traverse les terres de l’archipel pour un décor plus montagneux. Le voyage est plus long et plus physique, ce qui le rend d’office moins emprunté. Mais ce n’est pas pour autant qu’il est dénudé d’intérêt, et c’est ce que les collections de Hiroshige et Kuniyoshi viennent mettre en lumière.

De Hiroshige à Kuniyoshi

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Les 150 estampes dévoilées au musée Cernuschi sont tirées de deux collections sur le thème des Soixante-neuf Relais de la route du Kisokaidō. Plusieurs artistes pour plusieurs regards : la première collection, initiée par Keisai Eisen et achevée par Utagawa Hiroshige, dépeint les différents paysages qui jalonnent la route du Kisokaidō tandis que la seconde, que l’on doit à Utagawa Kuniyoshi, s’attardent sur une représentation bien personnelle et très culturelle de ces différents relais.

L’exposition Voyage sur la route du Kisokaidō débute dans une petite salle où est diffusée une vidéo montrant 9 des 69 relais selon 3 angles : une photo d’époque, sa représentation artistique, puis une photo moderne. J’adore ce type de mise en scène où l’on voit d’abord la différence entre la réalité et l’image, puis ce qu’il en ait advenu des siècles plus tard.

S’ouvrent ensuite deux pièces en enfilades où sont présentées les estampes de Einsen et Hiroshige, ainsi que certains objets d’époque que l’on peut observer dans les différentes œuvres. C’est personnellement, ma partie préférée de l’exposition. J’avais eu l’occasion de découvrir le traitement de la neige par Hiroshige lors de l’exposition Fuji, pays de neige, et depuis j’avoue avoir un certain faible pour ses paysages immaculés. C’est donc tout naturellement que je me suis longuement arrêtée devant les estampes Wada, le relais 29, et Oi, le relais 47. Mais ce ne sont pas les seules estampes qui m’ont tapé dans l’œil, loin de là même. Elles ont toutes un petit quelque chose qui les rendent particulières, notamment aux travers des émotions véhiculées. En admirant cette collection, on ressent les différents sentiments par lesquels ces courageux voyageurs passaient : de l’excitation au départ, puis de la découverte suivie par la fatigue que venaient calmer les moments de repos arrivé au relais. Des rencontres, des difficultés, des moments de partage et d’incroyables paysages. La découverte de ces estampes est un voyage en lui-même, qui nous laisse fantasmer à notre gré.

La deuxième collection, disposée dans une immense salle sobrement décorée aux personnages de Kuniyoshi, est un peu déconcertante. Pour tout dire, je ne m’attendais clairement pas à ça, et j’ai été agréablement surprise. Présentées pour la première fois au public, on découvre dans ces estampes une représentation très personnelle des différents relais qui jalonnent le Kisokaidō. Ici le paysage est en retrait, ce sont des personnages et des scènes qui sont mis à l’honneur. Propres à la culture japonaise, ces différents personnages représentent des acteurs de kabuki, des personnages de contes populaires ou encore des personnalités connues. L’artiste joue sur des jeux de mots et des mises en scènes comiques, le tout étant si propre à la culture japonaise qu’il est difficile pour nous, étrangers, de saisir le sens de ce qui est exprimé. C’est donc une contemplation assez passive qui se déroule, où l’on cherche à se raccrocher au peu que l’on peut reconnaître, tels que la célèbre Oiwa découverte lors de l’exposition Enfers et fantômes d’Asie ou les différents yōkai que l’on aperçoit.

Ces différentes collections sont accompagnées de différents objets utiles au quotidien de ces voyageurs, comme un magnifique bento ou des ustensiles pour fumer. Le tout se déroule dans une ambiance assez intimiste, sur un fond bleu nuit et un éclairage qui mettent en valeur les différentes œuvres. En somme, l’exposition Voyage sur la route du Kisokaidō -De Hiroshige à Kuniyoshi est un voyage en lui-même qui nous envoi dans un tout autre univers où se mêlent paysages, personnages et monstres. Nul doute que vous y trouverez votre bonheur, et je vous conseillerais de prévoir 2 bonnes heures devant vous pour en profiter pleinement.

Pour tous ceux qui n’ont pas l’occasion d’aller à Paris, vous pouvez vous rabattre sur le livre de l’exposition. Personnellement, j’achète toujours les livres des expositions qui m’ont plu, afin de ne pas oublier ce que j’y apprends et de pouvoir m’y replonger quand je le souhaite.

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Rendez-vous au musée Cernuschi avant le 8 août 2021 pour profiter de la magnifique exposition qu’est Voyage sur la route du Kisokaidō -De Hiroshige à Kuniyoshi au prix dérisoire de 9 euros (7 euros pour le tarif réduit). La réservation est obligatoire, et elle se passe par ici.

Et vous, connaissiez-vous le Kisokaidō ?

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2 commentaires

  1. 15 juillet 2021 / 12 h 35 min

    Hello, c’est un vrai plaisir de visiter à nouveau cette expo mais à travers ton regard cette fois-ci ! Tu as tout à fait raison de dire qu’on ressent totalement l’ambiance du voyage avec les états émotionnels et de fatigue des voyageurs de l’époque au gré de leur progression de la route, c’est une vraie histoire qui se déroule sous nos yeux. Bon ben… reste plus qu’à aller voir de nos propres yeux la Nakasendo d’aujourd’hui maintenant ^^ !

    • 25 juillet 2021 / 16 h 19 min

      Tu as tout dit ! Ce serait vachement chouette de faire un voyage sur les traces du Tokaido ou du Kisokaido… Un souhait de plus à rajouter sur notre longue wishlist ahah ?