Shukubo : dormir dans un temple bouddhiste au Japon
Si les auberges traditionnelles japonaises, les ryokan, sont connues même chez les néophytes, les shukubo, eux, sont assez méconnus.
Le shukubo, qui signifie « dormir chez les moines » est, comme vous l’avez sans doute compris, le fait de loger dans un temple bouddhiste. Cette pratique existe au Japon, mais pas que ! Il est également possible de dormir dans un temple bouddhiste en Corée du Sud par exemple (chose que je n’ai pas expérimenté, et que j’aimerais bien faire afin de comparer avec le Japon).
La première fois que j’ai entendu parler de la possibilité de dormir dans un temple bouddhiste c’est lorsque je me suis intéressée au mont Koya. Si vous ne connaissez pas Koyasan, je vous invite à lire mon article dédié au célèbre Mont Koya au Japon, mais pour la faire courte ici : le mont Koya est un peu considéré comme « the place to be » pour tester le Shukubo au Japon. Si vous voulez mon avis sur la question, ça se passe sur l’article de Koyasan cité juste avant et à la fin de celui-ci.
D’ailleurs, si vous connaissiez le concept du Shukubo avant de lire cet article, je suis prête à parier que c’est en vous intéressant à Koyasan que vous en avez entendu parler ! Si ce n’est pas le cas, je suis curieuse de savoir comment vous en avez entendu parler.
Le concept du shukubo
Dormir dans un temple bouddhiste est une expérience qui se veut être à la fois spirituelle et immersive. Il y a donc tout un tas de règles à suivre comme le fait de respecter le calme du lieu, retirer ses chaussures à l’entrée du temple et respecter les horaires des moines.
Lorsque l’on dort en shukubo, on vit au rythme des moines. L’idée est vraiment de s’immerger dans leur quotidien. On participe donc à différentes « activités » comme la méditation ou les rituels religieux du matin, et l’on goûte à la cuisine shôjin ryôri qui est un assortiment de plats végétariens.
La cuisine shôjin ryôri est propre au bouddhisme (et aux autres croyances influencées par le bouddhisme) et se caractérise par plusieurs principes comme celui de sélectionner des produits locaux et de saison, d’être quasi-exclusivement végétarienne (ou végétalienne pour certains), et d’éviter le gaspillage. On peut donc, par exemple, réutiliser des parties non consommées pour en faire des bouillons. La cuisine shôjin ryôri est riche en saveur et peut-être très proche du kaiseki (le repas gastronomique traditionnel japonais) chez certains bouddhistes qui s’attachent à un certain Art de la table (comme vous pouvez le constater sur les photos ci-dessous !).
Les rituels du matin, eux, peuvent différer d’un temple à un autre, mais ce sont généralement les mêmes qui reviennent : la séance de méditation, la cérémonie du matin qu’est la traditionnelle séance de pratique de la lecture des sutras bouddhistes, et le rituel du feu. À savoir que ces deux derniers se déroulent au petit matin : il faudra donc se lever autour des 5 heures pour y assister !
Il y a tout types de shukubo au Japon : du modeste temple avec peu de chambres au temple plus imposant où l’on se croirait dans un véritable ryokan de luxe. Il y a l’embarras du choix, surtout à Koyasan. De manière générale, les shukubo restent tout de même sur un modèle assez similaire les uns des autres : on note, par exemple, la présence d’un jardin ou d’un bain thermal. Dans les shukubo les plus prestigieux, on trouve des Fusuma-e qui sont des peintures sur des cloisons coulissantes réalisées par des artistes reconnus.
La réservation dans un shukubo se fait comme toutes autres réservations de logement : par des sites spécialisés comme booking ou sur le site officiel du shukubo ; mais il est à noter que certains shukubo ne se réservent que par téléphone, ce qui les rend peu accessibles aux touristes ne parlant pas la langue comme nous. Il est également à noter que le paiement se fait toujours en liquide, sur place.
Pour notre part, nous avons logé au temple Eko-In qui est un shukubo vieux de plus de 1000 ans que l’on peut classer dans les plus prestigieux de Koyasan : il n’y a vraiment rien à dire sur la qualité du service qui est irréprochable, et le dîner qui était juste succulent. C’est clairement une bonne adresse où loger pour se faire plaisir dans un cadre idyllique et s’essayer à la cuisine shôjin ryôri en ressortant totalement conquis. Le temple est magnifique et ce fut sans doute l’une de nos plus belles nuits de tout ce road trip de 3 mois au Japon.
Mon expérience en shukubo au Japon
Bien que j’ai été totalement conquise par le temple Eko-in, je dois avouer que j’ai un avis plutôt mitigé sur l’expérience du shukubo en elle-même.
Comme la grande majorité des visiteurs lors de leur premier voyage au Japon, j’ai écouté ce que tout le monde disait et j’ai fait pareil que les autres. Je suis donc allée à Koyasan qui est LE lieu spirituel du Japon, LE grand incontournable pour tester le shukubo au Japon ; sauf que j’en ai été plutôt déçue. J’ai d’abord été déçue de Koyasan, comme je vous en parle dans mon article cité en introduction, puis j’ai un sentiment assez clivé pour le shukubo en lui-même. En fait, je ne sais pas dire si le fait d’avoir été à Koyasan pour testé le shukubo a eu un impact sur mon sentiment mitigé, ou si le shukubo m’aurait donné cette même sensation ailleurs.
Si j’ai adoré la séance de méditation, qui fut pour moi une réelle redécouverte de cette pratique, j’ai en revanche eu beaucoup plus de mal avec les cérémonies du matin que je n’ai pas réussi à situer : était-ce réellement authentique ou finalement trop touristique ? Je pense que le manque de réels contacts avec les moines et la présence de 30 autres touristes en plus de nous n’aide pas à l’immersion.
J’ai finalement eu la sensation d’être dans un « simple » ryokan mais avec un dîner végétarien et la possibilité de participer à des « activités ». Je ne sais pas vraiment à quoi je m’attendais, mais je pense que j’avais en tête un vrai côté « immersif » que je n’ai pas eu. Je ne pense pas que ce soit le concept du shukubo en lui-même qui ne m’a pas plût, mais plutôt l’endroit où je les essayé. Avec la grande fréquentation de Koyasan, il ne faut pas s’attendre à quelque chose « d’exclusif » et de « simples ». Les seules interactions que nous avons eu avec les moines étaient les rendez-vous où nous nous sommes retrouvés en groupe de 30 pour les observer pendant leurs prières, c’est tout.
Comme je le disais plus haut : il y a plusieurs types de shukubo, et je pense que l’expérience doit considérablement changer de l’un à l’autre. Je regrette un manque d’échanges, mais cela est peu-être dû à la trop grande fréquentation du lieu.
Personnellement, je compte bien évidemment retenter l’expérience mais cette fois-ci dans un temple plus modeste et dans un lieu plus reculé, en espérant vivre une immersion plus riche.
Et vous, vous avez déjà testé l’expérience du shukubo au Japon ?
Si oui, quand avez-vous pensé ?
Merci pour cet article. Il laisse quand même rêveur bien que vous soyez mitigé par le côté touristique.
Oui mon appréciation est personnelle, et je pense qu’elle pourra changer avec une future expérience. Le concept en lui-même est en effet assez rêveur ! 🙂 Le charme à la japonaise.
Bonjour, nous avons été 7 fois 3 semaines au Japon, logeant principalement dans des ryokan(s) et minshuku(s)… mais aussi des shukubo(s) ! Oui, cela dépend beaucoup de l’endroit et oui, le Mont Koya est très/trop touristique, l’atmosphère pas forcément « rayonnante » et les shukubos y perdent passablement de leur charme car il y a en majorité des touristes non-japonais qui ne savent pas trop comment se comporter. Par contre, nous avons logé dans un shukubo au Mont Osore, tout au Nord de Honshu, sur la péninsule de Shimokita et nous étions seuls à part un jeune homme tokyoïte. Nous avons mangé ensemble dans une immense salle à manger déserte. Le prêtre était assez strict et nous avons dû regarder après le repas (sous sa surveillance) tout un documentaire (en japonais) sur le maître de la secte en question. Pas d’excuse non plus pour la cérémonie du matin, nous avons été réveillé à la première heure par le réveil général du complexe ! Mais un de nos plus beau souvenir reste le shukubo au Mont Haguro (Dewa Sensan). Là aussi nous étions seuls et nous avons été traités comme des rois. Le repas (végétarien) était mémorable, extraordinaire, notre number one au Japon ! Là, tout était très rustique, nous avons dormi dans une grande salle commune (mais vide !). Et puis, nous avons testé aussi un shukubo à Shikoku, tout à fait agréable. A Nagano, il n’y avait plus de place, alors nous avons dormi dans une auberge traditionnelle, mais qui se trouvait aussi dans le quartier des shukubo. C’était en hiver et il y a eu des illuminations le soir. Chaque shukubo avait éclairé son entrée, et on pouvait visiter les petits temples de chacun, avec des bougies dans la neige et des lanternes. Un beau souvenir également ! En bref, voyagez authentique, testez les logements traditionnels, c’est tellement mieux… et surtout, il y a toujours de bains !!! Puissions-nous retourner au Japon bientôt !
Bonjour Brigitte et merci d’avoir partagé avec nous votre expérience !
Cela donne vraiment envie (à part celui du Mont Osore … ^^) Vivement que l’on puisse retourner au Japon :).
Bonjour, merci à tous pour vos commentaires bien utiles 🙂 Auriez-vous une liste avec les différents sites web des shukubo réservables via Internet ?
Bonjour Blandine,
Malheureusement je ne crois pas qu’une telle liste existe… mais si vous en trouvez une, n’hésitez pas à nous la partager !
Je comprends tellement ce que tu as pu ressentir. Parfois on se rend dans des lieux spirituels & finalement le côté touristique a terni la pureté de l’intention première… C’est un peu ce qui me fait peur en Inde, j’espère ne pas trop me confronter à ça.
Mais comme tu le dis, en t’éloignant des coins très touristiques & en allant dans de plus petites structures, tu dois pouvoir vivre quelque chose de plus authentique.
En tout cas, le repas a l’air déliciiiiiiieux, j’adore cette façon de voir la cuisine et la vie en général. Et l’esthétisme du lieu où vous étiez a l’air ouf. ça donne envie de découvrir 🙂
Le repas est surement l’un des meilleurs que nous ayons eu (avec celui du ryokan de luxe), quant à la chambre et à l’établissement en lui-même, oui c’était vraiment beau et chaleureux. Sur ça, rien à dire, vraiment ! En plus j’ai eu la chance d’avoir le bain pour moi toute seule :). Ressenti mitigé sur l’immersion, mais je retenterais dans un endroit plus éloigné. Le commentaire ci-dessus donne envie d’aller se perdre !
Merci pour ton retour d’expérience, c’est très intéressant. Tu me donnes tellement envie de retourner au Japon, il y a tellement d’endroits à voir et de choses à tester !!!
Ca me rappelle un vieux souvenir : quand j’avais 14 ans j’ai été en Corée du Sud avec ma famille, chez nos amis coréens, et ils nous ont amené dans un temple bouddhiste pour y manger le midi. Mais ils avaient bien insisté qu’il fallait manger TOUT ce qu’on prenait dans son assiette (ne pas laisser un grain de riz), alors je crois qu’à part du riz je n’avais pas pris grand-chose, de peur de ne pas aimer et de paraitre impolie x)
Ahah le traumatisme d’enfance ! Drôle d’anecdote 🙂 En étant enfant tu devais être très intimidée en plus ^^
Merci pour ton article sur le shukubo, c’est grace à toi que nous avons atterri au temple du tigre (Gyokuzoin). Une expérience inédite qu’on ne se voyait pas faire ailleurs qu’au Japon !
Bonjour Alexandre,
Ravi de savoir que mon blog a pu vous aider ! J’avais repéré le Gyokuzoin pour mon prochain voyage (hiver 2024-2025), j’espère pouvoir y faire un tour 🙂